L’algorithme a le vent en poupe, et les exemples ne manquent pas. On pourrait parler de l’anticipation, où grâce aux algorithmes de la plate-forme Healthmap, le virus Ebola avait été détecté 9 jours avant l’annonce officielle de l’OMS, ou de la prédictibilité de la police new-yorkaise qui par analyse des réseaux sociaux permet de suivre les débordements éventuels des supporteurs après un match, ou les places boursières qui font la majorité de leurs actions par algorithmes.

L’algorithme permet de connecter énormément de données (les fameuses Big data) pour mettre en évidence des corrélations et avec des modèles mathématiques, assurer la prédiction d’autres événements. Les GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple) par exemple, vivent de l’algorithme, mais cela touche des domaines plus larges, le zoo de Cincinnati suit ses visiteurs à la trace et propose des spécificités en fonction du trafic grâce à un algorithme. Il serait surprenant que la formation ne puisse pas bénéficier d’une telle potentialité… Et comme l’algorithme devient intelligent, il choisit l’algorithme le mieux adapté à la situation, la formation aura-t-elle l’intelligence de l’algorithme ?

Refuser à la machine la délégation de former ?

Qu’est-ce qui gêne ? C’est de refuser à la machine la délégation de former… La formation deviendra-t-elle le dernier rempart à la rationalisation des choix humains ? L’homme n’est pas une machine, n’en déplaise à La Metrie… le problème est culturel. Le battle homme vs machine est dépassé. L’homme a déjà délégué une partie de sa décision à la machine… que fait le conducteur quand il s’oriente avec un GPS qui lui dit où aller ? L’homme programme la machine avec ses spécificités de conduire et s’il ne se soumet pas à la machine, le GPS recalcule un nouveau parcours optimal. L’homme suit la machine… Et que dire de Google avec son algorithme PageRank, qui structure le savoir ? Le référencement devient un déterminant de la connaissance. La peur est mauvaise conseillère.

Libérer du temps pour la création, l’imagination, la relation

Les algorithmes en formation ont une légitimité évidente, ils permettent de gagner du temps dans l’analyse des données de l’apprenant, les ajustements peuvent se faire en temps réel pour coller au plus près des besoins. Michel Serres l’avait annoncé face à ceux qui critiquent la numérisation, il s’agit de libérer du temps pour accélérer l’apprentissage mais surtout pour le consacrer à d’autres activités socialement plus valorisantes comme la création, l’imagination, la relation,… au fond, il s’agit non pas tant d’opposer l’algorithme à l’homme que de marier leurs potentiels.

La difficulté est de faire de la formation au XXIème siècle avec un référentiel du XXème. Un nouveau champ des possibles s’ouvre devant nous, il ne s’agit pas de développer une béatitude technologique, mais de proposer un nouveau militantisme de la formation. L’algorithme n’est pas neutre dans la fonction d’apprendre, mais il s’agit de créer les formes nouvelles de la formation, une utopie apprenante à construire, un contrat social, une liberté nouvelle… que les machines ne savent pas encore organiser…

A propos de l'auteur

Stéphane Diebold a mis son expérience au service de l’innovation pédagogique et de la performance en entreprise, au sein de TEMNA dont il est le fondateur depuis 2003. Associatif, il a assumé des responsabilités dans une dizaine d’association, essentiellement formatives, et est aujourd’hui président fondateur de l'AFFEN (Association française pour la Formation en entreprise et les Usages numériques).  

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