CEP, la fin de l’orientation ? Par Stéphane Diebold

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La réforme de la formation dans son triptyque CPF, CEP et entretiens professionnels, laisse une part importante à l’orientation professionnelle. Dans un monde en questionnement, il semble assez légitime de laisser une place plus importante aux problématiques d’orientation, mais de quelle orientation parle-t-on ? Comment orienter dans un monde qui perd en visibilité ? S’agit-il d’une véritable avancée sociale ?

Le 20e siècle a été caractérisé par la création de formations fondées sur le savoir des métiers. Le 21e siècle a démarré avec le life-long learning et la directive de Lisbonne. Que peut-on en dire ? Que l’on a observé un glissement de la formation en fonction de l’offre à une formation en fonction de la demande. L’organisation scientifique de la formation (OSF) avait pour habitude de laisser les sachants établir les projets stratégiques de l’entreprise pour ensuite définir les besoins en compétences. Aujourd’hui, on redonne la main aux apprenants, comme l’illustre le triptyque de la réforme. Et ce n’est pas facile… Dans un monde qui bascule, il devient difficile de prévoir… Tout particulièrement si l’on fonctionne sur les seuls modèles issus de la projection du passé.

On retrouve cette difficulté dans le choix des indicateurs de pilotage. La connaissance a laissé place aux compétences qui laisse place aujourd’hui aux talents, une compétence anticipée.

 

Remettre l’apprenant au centre de la formation, un slogan

Remettre l’apprenant au centre de la formation en matière d’orientation nécessite de l’interroger sur sa notion de projet. Et c’est ainsi que, dès la fin du 20e siècle la notion de projet professionnel s’est imposée dans les entretiens. Il s’agissait de savoir ce qui motivait l’individu. Mais ce raisonnement porte en germe une faille : si l’entreprise avec tous ses moyens n’est pas capable d’anticiper l’avenir, il est fort peu probable qu’un individu seul puisse avoir une meilleure visibilité. Comment l’individu pourrait-il projeter son devenir professionnel ? Aujourd’hui, la littérature de l’orientation de la formation quitte le nid du projet professionnel pour proposer celui d’un projet de vie. C’est bien dans ce cadre-là que le CPF et le CEP peuvent se faire en dehors des entreprises. L’individu gagne ainsi une liberté… à condition d’avoir un projet de vie. En élargissant le programme, gagne-t-on en efficacité ? L’idée d’un projet de vie dans un monde disruptif, est philosophiquement douteuse : l’homme doit-il construire son chemin à partir de ses projections personnelles ou doit-il être opportuniste, saisir les opportunités qui s’offre à lui. L’homme ne doit-il pas devenir agile pour triompher d’un environnement instable ? L’orientation projet n’est-il pas un outil fossile d’un siècle qui n’est plus ?

 

Au fond, le questionnement sur l’orientation personnelle n’est que le reflet d’une absence d’orientation collective. L’orientation n’a de valeur que si des corps intermédiaires filtrent les choix, les opportunités, pour leur donner leur dimension sociale et faire sens… Le CEP est la solution à un problème qui n’est pas posé. Orienter oui, mais vers quel projet ?

 

A propos de l'auteur

Stéphane Diebold a mis son expérience au service de l’innovation pédagogique et de la performance en entreprise, au sein de TEMNA dont il est le fondateur depuis 2003. Associatif, il a assumé des responsabilités dans une dizaine d’association, essentiellement formatives, et est aujourd’hui président fondateur de l'AFFEN (Association française pour la Formation en entreprise et les Usages numériques).  

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