Réforme : la charge des « Hiboux »

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On connaissait les « Pigeons », voici venir les « Hiboux ». Lancé par Arnaud Portanelli et Guillaume le Dieu de Ville, par ailleurs fondateurs de l’organisme de formation en langues Lingueo, le mouvement qui a réuni depuis la mi avril penviron 2500 signatures émanant de candidats à la formation continue mais aussi d’organismes spécialisés pointe les défauts de la réforme.

Ce n’est un secret pour personne que la mise en place de la réforme de la formation professionnelle lancée le 1er janvier marque le pas. Listes de formations éligibles longues à venir, fonctionnement aléatoire du site web dédié au CPF, faible nombre de Comptes ouverts, plusieurs indicateurs sont à l’orange… « Si nous avons lancé le mouvement des Hiboux à la fin du mois d’avril, explique Arnaud Portanelli, c’est pour donner corps au sentiment de ras-le-bol exprimé par de nombreux acteurs de la formation continue, de même que par de nombreux candidats à la formation, tant l’impression de flou règne autour du nouveau CPF.… Les chiffres le montrent, ce nouveau dispositif ne prend pas. En cinq mois, un peu moins de deux millions de comptes personnels de formation ont été ouverts et on ne compte qu’un millier de dossiers validés … Des chiffres ridicules si on les compare aux 50 000 DIF auparavant mis en route chaque mois. »

Si le mouvement n'en est encore qu'à son commencement, les principaux reproches des « Hiboux » ne sont pas incongrus... Exemples: des modes de financement compliqués, notamment si les formations envisagées dépassent les 150 heures réglementaires du CPF, des listes de formation qui tardent à venir, et globalement une grande lenteur de mise en route. « Dire que 2015 sera une année de transition n’est pas réaliste. Car derrière ce constat, il y a des salariés qui ne peuvent se former faute de trouver les bons modes de financement, et des organismes de formation pénalisés par la lourdeur du système. Aujourd’hui, de nombreux salariés ont l’impression d’avoir perdu un droit, le DIF, au profit d’un compte qui ne fonctionne pas. »

 

« Une bureaucratie dont on n’arrive pas à s’extraire »

Alors faudra-t-il revoir la copie ? Ou des ajustements sont-ils encore possibles ? Selon Guillaume Huot, membre du directoire de Cegos et membre du bureau de la Fédération de la formation professionnelle (FFP) « il n’y a pas à remettre en cause un mouvement de réforme que nous avons tout de suite perçu comme positif. Certaines difficultés sont cependant évidentes et l’on est en train de se piéger collectivement dans une bureaucratie dont on n’arrive pas à s’extraire. »

Un site web www.moncompteformation.gouv.fr dont le fonctionnement erratique rend difficile toute inscription de même que toute recherche de formation, une difficulté de financement évidente tant les différents acteurs –organismes de formation, OPCA, entreprises…– ne sont pas tous au fait des nouvelles règles et de leurs modalités d’application, les conditions du succès ne sont pas réunies. « Aujourd’hui, on peine à comprendre le cadre général, ce qui entraîne un climat d’incertitude au sein des entreprises qui hésitent, dès lors, à engager des démarches de formation… » En clair, l’heure est à l’attentisme. « Si l’on prend un autre exemple, à savoir les listes de formation éligibles, souligne Guillaume Huot, on se rend compte que l’élaboration d’un inventaire complet prend beaucoup plus de temps que prévu. Difficile dans ce cas de mobiliser un CPF. Un important public n’a par ailleurs pas besoin des formations diplômantes ou certifiantes promues par le CPF, mais ne peut plus voir financés des cursus courts plus adaptés, et qui étaient auparavant l’affaire du DIF » En clair, l’inquiétude est manifeste face à une situation de « transition » qui risque de perdurer au moins jusqu’à la fin de l’année. Un délai dont s’accommodent mal les organismes dont l’activité a baissé, de même que les salariés désireux d’évoluer.

« Un site plus performant, des listes revisitées et ouvertes, au moins pour un temps, des formations en rapport avec les vrais besoins du marché, il serait bon de réinjecter une dose de pragmatisme », termine Guillaume Huot. De quoi au moins débloquer les situations les plus critiques… 

 

Antoine Teillet

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