Transmettre le savoir a été souvent considéré comme une fonction neutre, c’est le savoir qui avait de la valeur, le média était au service. Les premières analyses contemporaines considéraient que l’information et la formation ne pouvaient pas faire bon ménage… l’information était toujours suspectée de désinformation, de manipulation ou d’autres aliénations sociales, là où la formation était née pour l’autonomisation des apprenants, leur apprenant à s’émanciper du système… deux univers qui avaient du mal à communiquer. La formation étant en présentiel, d’homme à hommes, la transmission était plus « vraie », selon la vieille critique socratique.

Selon Stoetzel, le média fait la communauté apprenante

Ce n’est qu’avec les années 50, avec la naissance de la télévision, que les analystes lèvent l’hypothèse de neutralité des médias. Les perceptions changent… deux axes se sont dégagés et deux auteurs majeurs : le Français, Jean Stoetzel et l’Américain Marshall McLuhan.

Jean Stoetzel met en lumière que le fait que les médias sont des outils de « reliances », ils font le social, le commun… Le média fait la communauté apprenante. Aujourd’hui, on pourrait dire que des médias comme les serious games ou le social learning composent et recomposent les communautés au gré des rituels de la diffusion de leur contenu. Choisir et animer son média permet de segmenter la formation que l’on veut dispenser à la cible que l’on a identifiée. Jean Stoetzel ouvre la voie au multicanal de la formation et à la différenciation marketing de la formation. Les jeunes tweetent plus que les anciens, choisir Twitter c’est choisir un segment d’apprenant.

Marshall MacLuhan va plus loin en considérant que c’est le média qui façonne le contenu et pire la façon de penser de l’apprenant avec son fameux aphorisme « le médium est le message ». La littérature a rendu hommage à cette idée par l’article de Wired, « Internet rend-il idiot ? » L’histoire est ancienne : le canal de diffusion des troubadours qui récitaient par cœur des contenus, favorisant la reproduction des savoirs, a laissé place à la diffusion livresque qui a changé la façon d’apprendre et de penser, abandonnant la duplication au profit du débat. Aujourd’hui comment Twitter transforme notre façon d’apprendre est une bonne question de médiologie ?

Les supports émergents, tremplins pour la médiologie

La médiologie connaît d’autant plus une actualité que les supports se multiplient. Si le présentiel reste majoritaire, d’autres média émergent : video learning, radio learning, social learning, mobile learning, twittagogie, serious game,… et d’autres encore se profilent… une autre question de médiologie est de savoir comment assurer une convergence de tous ces messages pour assurer une cohérence des apprentissages. Et des retours de pratiques se font jour, avec par exemple, le cross média, le présentiel qui appelle efficacement le numérique, ou inversement, le numérique qui tease efficacement le présentiel. Reste à trouver la pédagogie qui saura articuler contenu et contenant dans une grammaire nouvelle. La médiologie ouvre à une inventivité sociale qui dessine de nouvelles formes de formation. Voilà qui devrait intéresser particulièrement les entreprises…

A propos de l'auteur

Stéphane Diébold a mis son expérience au service de l’innovation pédagogique et de la performance en entreprise, au sein de TEMNA dont il est le fondateur depuis 2003. Associatif, il a assumé des responsabilités dans une dizaine d’association, essentiellement formatives, et est aujourd’hui président fondateur de l'AFFEN (Association française pour la Formation en entreprise et les Usages numériques).  

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