Contenu, apprenant, formateur. Par Michel Diaz

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On croyait le modèle bien établi, pouvant rendre compte de pédagogies plus ou moins variées selon que l'on met l'accent sur les contenus, l'apprenant ou le formateur. Le triangle de Jean Houssaye a vraisemblablement vécu.

Il faut imaginer ce triangle aux trois sommets, dessinant un dispositif de formation magistrale quand le formateur prime sur l'apprenant et le contenu, ou une pédagogie participative "orientée apprenant" quand celui-ci est en effet placé "au centre" du dispositif, le formateur facilitant l'émergence et la synthèse des connaissances dans le groupe des apprenants.

 

Un modèle qui éclaire ce qui se joue dans le digital learning. Avec une première étape au début des années 2000 qui a vu les entreprises tester la disparition du formateur… et de l'apprenant ! Celles-ci se concentraient alors sur les contenus :  le e-learning devait permettre, sous forme de suites d'écrans animés, d'encapsuler des graines de connaissances recomposables dans divers agencements de formation, et alimenter les bases de KM (Knowledge Management) dont on parlait alors beaucoup (un sujet nettement passé de mode aujourd'hui).


Un dispositif à construire

Ce e-learning (non accompagné) s'est alors soldé par un échec faute que la qualité des contenus et la maturité des entreprises, des salariés et de la technologie ne soient au rendez-vous. On a fini par s'aviser que l'apprenant ne peut être oublié, que l'efficacité des apprentissages dépend de son engagement dans le cadre d'un accompagnement pensé, raisonnable, qui s'est rapidement contenté d'une simple combinaison du e-learning avec le présentiel. Car il faut l'admettre : l'entreprise ni la communauté des formateurs n'ont su imaginer ce dispositif d'accompagnement, qui reste à ce jour largement à construire. Les formateurs notamment - on ne saurait le leur reprocher - continuant de faire ce qu'ils ont toujours fait : former ! Bref : si l'apprenant du modèle de Jean Houssaye a fini par faire surface, c'est dans des dispositifs blended learning qui empruntent toujours beaucoup à une pédagogie traditionnelle.


Un modèle obsolète

On pressent toutefois qu'un renversement est en cours. L'apprenant gagne sa liberté ; il butine sur le web, dans les réseaux sociaux, sur l'intranet ou la plateforme LMS de son entreprise, l'information et la connaissance dont il a besoin, sans nécessairement passer par la médiation du département formation. Il trouve en son manager, le plus souvent, un allié de poids, intéressé par la réactivité qu'offre cette prise d'autonomie aussi rendue possible par la maturité grandissante des apprenants. Il faut en parler au pluriel… C'est là que le "triangle", parmi d'autres nombreux modèles, échoue à rendre compte de la formation comme elle va : les apprenants se constituent progressivement en collectif - communautés de pratique, d'apprentissage… à l'aide des outils du Web 2.0 et, experts ou non, créent à leur tour des connaissances qui échappent aux anciens processus de production.

 

Liberté gagnée aussi sur des contenus dont l'obsolescence s'accélère : les apprenants ne prennent au sérieux que ce qui permet d'être aussi performant, à l'aise, que possible dans un monde où la connaissance se renouvelle toujours plus vite.

 

Monde nouveau, modèles à venir pour le penser !

 

 

A propos de l’auteur :

 

Michel Diaz est directeur associé de Féfaur (www.fefaur.com), premier cabinet d'études et de conseil e-learning indépendant sur le marché français et l'un des leaders européens, au sein duquel il conseille et accompagne les grandes entreprises et organisations dans leur stratégie et gouvernance e-learning et formation mixte. Conférencier recherché, il intervient et publie régulièrement en France et à l'étranger. Il est par ailleurs Directeur de la rédaction du site e-learning Letter (www.e-learning-letter.com).

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