Informatique : le parent pauvre de l’évaluation des compétences ?

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Très utilisés et peu évalués. Voilà tout le paradoxe qui entoure les outils informatiques. Pourtant, un certain nombre de solutions existent. Retour sur la question.

« Plus de 2 français sur 3 utilisent des logiciels professionnels (Excell, Powerpoint, Word…), et c’est le cas pour 97 % des cadres et 84 % des jeunes », commence Matthieu Lattes, co-fondateur d’Isograd, sondage commandité à l’institut CSA à l’appui. Il reprend : « Mais 63 % de ces mêmes utilisateurs déclarent perdre du temps du fait de leurs lacunes. » Il existe sur ce point un certain paradoxe, que souligne Stéphane Morioux, président de Futurskill : « Par exemple, dans la vie d’un cadre, le temps passé à gérer ses e-mails est conséquent, et personne ne se soucie de savoir si le cadre en question perd ou non du temps sur cette tâche. » Pourtant, en matière de compétences informatiques, il existe un certain nombre de solutions : les certifications professionnelles informatiques comme la certification Microsoft, le PCIE (Passeport de compétences informatiques européen), le C2i dans l’enseignement supérieur ou encore le tout récent Tosa, lancé par Isograd. Mais pour l’heure, le recours à ces tests et/ou certifications demeure assez faible.  

Différents modes d’évaluation

Est-ce à dire que l’on n’évalue pas les compétences informatiques ? « Pas exactement, répond Stéphane Morioux. Il existe aujourd’hui trois grandes façons de les évaluer. D’abord l’entretien classique, en face à face, au cours duquel un recruteur va demander des explications sur des réalisations passées. Il y a également la mise en situation qui va consister à recopier un texte, un tableau ou développer un bout de code. Et enfin, moins répandus, mais intéressants, il existe un certain nombre de tests. »  Sur ce point, le spécialiste relève que tous les tests ne se valent pas. Il explique : « Un certain nombre de tests n’évaluent que le bon sens, en proposant un QCM où la réponse est finalement évidente. Le bon sens est important, mais il faut s’interroger sur ce que l’on veut mesurer. » Sans oublier l’importance de la validation scientifique et professionnelle desdits tests.

Un marché en devenir

L’autre question qui peut alors se poser, est celle de la pertinence de ces tests. Le marché est-il mûr pour ce type d’évaluation ? Pour Stéphane Morioux, la réponse ne peut se résumer à un "oui" ou un "non" francs. Il appuie : « Il existe aujourd’hui des dispositifs liés à l’emploi qui permettent de tester une nouvelle recrue autrement : la SSII proposera un CDI après un certain moment à son consultant. Les stages ou l’assistanat par la voie du CDD ou de l’intérim permettent également de faire un test grandeur nature. » L’autre élément de réponse réside dans le fait que les tests ne sont pas nécessairement justifiés pour tous les profils. Sur les postes à haut niveau de qualification, la maîtrise technique est induite par la formation initiale et les expériences. « Sur des métiers difficiles, exigeants comme dans les call-centers, on va privilégier la montée en compétence en interne », ajoute Stéphane Morioux.

Un enjeu pour la formation

Mais le spécialiste s’interroge : « Est-ce que les coûts générés, les erreurs de recrutement ne justifieraient pas de prendre un peu plus de temps au démarrage et d’investiguer la connaissance technique des candidats ? » Des tests qui n’affichent pas leur pertinence uniquement dans l’univers du recrutement. « Avec le Tosa, nous proposons à la fois une évaluation et une certification, note ainsi Matthieu Lattes. Il y a là un véritable enjeu pour la formation. Il s’agit d’évaluer l’efficacité des programmes de formation. Les entreprises disposent d’un véritable outil d’analyse de leur retour sur investissement. » Un outil qui intéresse en premier lieu les organismes de formation. Avec la réforme de la formation professionnelle du 24 novembre 2009, ces organismes doivent délivrer « au stagiaire une attestation mentionnant les objectifs, la nature et la durée de l'action et [surtout] les résultats de l'évaluation des acquis de la formation », rappelle la loi. Matthieu Lattes confirme : « Nous sommes aussi sollicités par les organismes de formation. Nous pouvons faire un test avant, puis un autre après la formation. » Stéphane Morioux conclut : « Oui, on évalue peu aujourd’hui. Mais j’ai une conviction de fond selon laquelle demain, il faudra évaluer de plus en plus, avec des solutions génériques. »

 

Brice Ancelin

Crédits photo : Fotolia.com

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