L’innovation est-elle technologique ou pédagogique ? Par Michel Diaz

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La formation innove largement en s’inspirant des nouveaux usages induits par des innovations technologiques « exogènes », ce qui impose aux départements formation de veiller bien au-delà du seul champ de leur discipline.

Les innovations en formation ne sont pas toujours celles qu’on croit. Par innovation, on se réfère le plus souvent à la technologie. Or les secteurs de l’éducation et de la formation en sont plutôt pauvres. Quelles sont en effet les principales innovations technologiques qu’on peut directement leur imputer ? J’en vois deux, guère plus : les outils auteurs et les plateformes LMS. Les premiers sont réellement issus d’une réflexion des concepteurs pédagogiques sur la meilleure façon de produire des contenus multimédias et autres modules e-learning ou rapid learning sans en passer par la maîtrise d’un véritable langage informatique de type Flash. De fait la plupart des outils auteurs disponibles sur le marché partagent un même coeur fonctionnel, permettant de scénariser, de créer et chaîner des activités, de « décoriser » ou encore de définir les actions que l’apprenant pourra appliquer sur les objets présents à l’écran. Des fonctionnalités qui n’épuisent pas le concept d’outil auteur : les éditeurs ne manquent pas d’imagination pour différencier leurs solutions ; mais les « core features » sont bien les mêmes. Idem des plateformes LMS : assemblage et diffusion de parcours d’apprentissage en ligne, suivi des temps et des résultats, reporting… Sans être accessoires, les autres fonctionnalités sont mises au service de ce principe de base, visant notamment à améliorer le confort d’utilisation des apprenants, des managers ou des administrateurs.

 

S’approprier les innovations d’autres champs d’activité

 

Si la formation est avare d’innovations technologiques, elle peut au contraire s’approprier facilement des innovations provenant d’autres champs d’activité. Un premier exemple qui vient à l’esprit est évidemment celui des Serious Games, qui consistent en l’application des principes et des techniques du jeu vidéo au domaine réputé sérieux des connaissances et compétences… Une façon de promouvoir le Gai Savoir ?! En tout cas une tentative plutôt risquée, au résultat parfois décevant pour l’apprenant habitué au réalisme graphique et situationnel des grands jeux vidéos pour Playstation ou Xbox. Autre exemple de la façon dont la formation s’inspire d’usages d’une technologie « exogène » : le mobile learning. Inspiration souvent paresseuse, passant à côté de l'opportunité d’une remise à plat des  fondamentaux de la formation, comme vient fréquemment l’attester la simple migration de contenus e-learning (développés en Flash) du monde PC à celui des tablettes. En cause la pression sur les coûts, bien sûr ; aussi la difficulté de réinventer la pédagogie autour de ces nouveaux usages.

 

MOOC, Badge, learning analytics, seamless learning

 

Pour résumer : ce qui transparait des listes d’innovations régulièrement publiées dans le secteur de la formation ou de l’éducation, c’est qu’elles sont d’essence pédagogique (ce qui est plutôt rassurant), et non technologique (au sens numérique). Un constat qui vaudra par exemple pour les listes de l’Open U ou de Deloitte : MOOC, Badge, learning analytics, seamless learning (apprentissage unifié), crowd learning (apprentissage par la foule), digital engagement et autres « social activation ». Ces tendances qui s’appuient sur des technologies numériques apparues hors le champ de la formation doivent inciter les responsables formation à étendre leurs dispositifs de veille bien au-delà de la sphère habituelle de leurs préoccupations. Cela vaut pour les usages plébiscités par les utilisateurs, et qui devront trouver leur prolongement naturel dans les systèmes d’apprentissage ; cela vaut aussi pour la façon de communiquer auprès de ces nouveaux apprenants… Cette veille doit aussi porter sur les business model de l’économie numérique, qui peuvent suggérer des nouvelles pistes de revenus aux organismes de formation.

 

A propos de l’auteur :

Michel Diaz est Directeur associé de Féfaur, premier cabinet d'études et de conseil e-learning indépendant sur le marché français et l'un des leaders européens, au sein duquel il conseille et accompagne les grandes entreprises et organisations dans leur stratégie et gouvernance e-learning et formation mixte. Conférencier recherché, il intervient et publie régulièrement en France et à l'étranger. Il est par ailleurs Directeur de la rédaction du site e-learning Letter.

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