Toujours plus de complexité pour le responsable formation

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Philippe Joffre est notamment directeur du programme responsable formation développement, récemment lancé par le groupe IGS formation continue. Il revient sur les enjeux auxquels sont confrontés aujourd’hui les responsables formation.

Dans quel contexte évoluent aujourd’hui les responsables formation ?

Les besoins sont de plus en plus complexes, urgents et individualisés. Le tout avec de moins en moins de budget. Avec les crises successives que nous vivons, la recherche d’optimisation de budget est constante depuis 20 ans. On demande de même aux responsables formation d’afficher une capacité à accompagner les projets de façon très réactive, dans une logique d’ingénierie simultanée, tout en anticipant les besoins en compétences à 5 ou 6 ans, avec une obsolescence des connaissances de plus en plus rapide.
Ils doivent aussi intégrer le développement des nouvelles technologies dans les  entreprises. Ces dernières veulent y aller pour baisser les coûts de formation par personne, mais beaucoup n’y vont pas car cela demande trop d’investissements. En fait, à de nombreux égards, le contexte est assez paradoxal : alors que les entreprises recherchent de plus en plus la simplicité, le système se complexifie.

Comment se matérialise cette complexité ?

Par exemple, les technologies permettent une diversité de réponses que l’on peut adresser à un besoin donné. Mais cela demande des expertises, des tests, des expérimentations pour le faire et le déploiement est forcément plus complexe à organiser.
La dimension internationale demande aux grands groupes français de ne pas penser leur système de formation sous un angle purement franco-français, avec toute la complexité que cela emporte pour les autres pays. Pour certains groupes français, c’est quelque chose d’encore nouveau.
Par ailleurs, nous sommes toujours entre deux réformes. Nous commençons juste à percevoir une stabilisation, une adaptation aux précédentes réformes de 2004 et 2009 (sur les contrats de professionnalisation, la création du Fond paritaire de sécurisation des parcours professionnels, la réorganisation des Opca…) et l’on nous promet déjà une nouvelle réforme. Même si les évolutions sont souhaitables, la complexité est excluante. Il y aura forcément un nouveau temps de latence pour s’adapter à de nouveaux dispositifs et aux nouvelles priorités de financement.

Quelles conséquences pour le responsable formation ?

La première conséquence, c’est qu’au lieu de se positionner dans une démarche à valeur ajoutée, il va devoir digérer une nouvelle boite à outils. Et c’est ce dont il souffre depuis 30 ans.  Cette complexité aura aussi un impact sur la façon de penser et d’organiser la formation. On le voit, par exemple, sur toutes les questions récurrentes autour de l’externalisation ou non de la formation.
Mais un des impacts les plus importants relève des compétences des acteurs de la formation dans l’entreprise. Il y a un double mouvement qui consiste à demander aux responsables formation d’être « business partner » - et donc plus généraliste et disposant d’une forte culture métier - ,mais aussi d’être de plus en plus pointus sur des domaines de plus en plus variés… Aujourd’hui, en formation, on peut faire appel à l’événementiel, la vidéo, l’animation de communautés, du blended learning, des financements multiples, etc. Autant de savoir-faire qui demandent une expertise particulière qui n’existe pas toujours dans l’entreprise.  On ne peut pas être un spécialiste de tout. Cela va demander une répartition nouvelle des savoirs dans l’entreprise.
On veut également que le responsable formation soit en mesure d’intégrer les enjeux de différents secteurs d’activité. Il doit être capable de dialoguer avec son client (interne ou externe) de son secteur, de son activité, etc. Cela va peut-être aussi demander que l’on mobilise des personnes qui ne sont pas issues du secteur de la formation et qui n’y restent pas.

Comment préparer le responsable formation à ces évolutions ?

Cela demande de se réinterroger sur sa formation. Les entreprises ont une certaine difficulté à investir sur les compétences de ceux qui vont développer celle des autres. Mais il y a de vrais métiers dans la formation et ils se complexifient. Parmi les compétences attendues, on retrouve la capacité à faire du design, monter des dispositifs blended, écrire des storyboards pour les serious games, développer la formation des tuteurs, faire de l’ingénierie de financement…
Au sein des formation qui leur sont dédiées, il faut aborder des champs un peu nouveaux, apprendre à analyser cette complexité, faire vivre les dispositifs aux responsables formation qu’ils vont adresser ensuite aux stagiaires, en particulier sur le e-learning ou le blended, l’animation de communautés, etc. De fait, la professionnalisation des acteurs de la formation est un enjeu majeur pour les entreprises.

Propos recueillis par Brice Ancelin

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