Evaluation des compétences : un exercice difficile. Par Jean-François Ballay
Du fait de sa position centrale au « coeur de métier » de l’entreprise, le manager est en première ligne pour évaluer concrètement les compétences de son équipe et contribuer à l’évolution professionnelle de ses collaborateurs. En prenant garde, toutefois, de ne pas tout lui demander ! Il ne peut évidemment se substituer aux autres acteurs de l’évaluation qui se trouvent in fine à l’extérieur de l’entreprise : le marché et la société.
- Cependant, l’entreprise a quand même besoin d’évaluer de l’intérieur ses compétences pour les entretenir et les développer, en lien avec le rôle du manager. Au-delà de l’évaluation locale à laquelle contribue le manager de proximité, l’entreprise cherche à avoir une vision globale, par la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences. Cela suppose une analyse de ce qu’elle considère comme ses « compétences distinctives » et un travail permanent d’anticipation, qui mobilise à la fois le management et les ressources humaines (recrutement, mobilité interne, formation…).
- Le champ de la formation professionnelle crée ainsi des dispositifs censés répondre à des cahiers des charges précis, et soumis, en aval, à des modalités d’évaluation. Ces modalités peuvent être parfois assez simples, par exemple quand les participants évaluent un séminaire ou un stage de management (un questionnaire rempli à l’issue du stage). Mais il existe aussi des cas plus complexes, par exemple les formations qualifiantes, où un jury de professeurs, de formateurs et de tuteurs est constitué pour juger des résultats d’un apprenti. Le cas des cursus d’apprentissage par alternance se réfère au modèle canonique de l’école, du point de vue de l’évaluation, puisque c’est la situation typique où l’on peut délibérer collégialement sur les critères d’appréciation des acquis. Les managers et les cadres des fonctions d’appui ont, eux aussi, besoin de se professionnaliser, mais c’est plus compliqué à évaluer. La modalité est alors en grande partie qualitative et subjective : il n’y a pas d’instance supérieure, comme dans le cas de l’école, pour juger des résultats. En outre, comment évaluer les acquis à l’issue d’un séminaire sur la santé et la sécurité au travail, ou sur le développement durable ? Dans ces cas, l’accent est mis de préférence sur des aspects comme l’auto-évaluation et sur l’appréciation de la démarche pédagogique mise en oeuvre par les intervenants. Avec les limites inhérentes à cet exercice...
Ce qu’un individu apprend reste en grande partie invisible
- Au-delà de cette large diversité des modalités d’évaluation des compétences, « attendues » ou « acquises », il faut retenir que ce qu’un individu apprend ne peut guère se réduire à une mesure quantitative : la connaissance, qu’elle soit acquise sur le terrain dans un projet, dans un réseau professionnel, ou dans des cursus de formation, génère d’une part des effets externes directement visibles et, d’autre part, des effets internes non mesurables qui peuvent s’échelonner dans le temps. Parfois, ce sont ces effets internes qui s’avèrent les plus importants (ce qui ne veut pas dire, d’ailleurs, qu’ils soient « efficaces » !). Par exemple, les « savoirs d’expérience » d’un expert ou d’un manager se voient en de nombreuses occasions – mais de l’extérieur : capacité à résoudre un problème complexe, à anticiper un signal faible dans l’environnement, ou à faire des liens entre des problèmes distincts. Il est indispensable de prendre conscience de cette complexité de la compétence « réelle » des hommes, qui peut être souvent en écart avec le modèle théorique issu de la GPEC. Si l’on veut atteindre la sacro-sainte « excellence » en matière de développement des compétences, cela suppose, au-delà des instruments de mesure quantitative et des dispositifs institutionnels, une culture et des modalités concrètes d’analyse qualitative sur le terrain, de délibération et d’évaluation des connaissances entre pairs, entre parties prenantes du métier. Et, plus encore peut-être, de porter une grande attention à toutes les conditions psychologiques et sociales dont l’entreprise a besoin pour exister durablement et pour être utile à la société – ce qui, rappelons-le, est tout de même une finalité de cette forme d’organisation productive que l’on nomme l’« entreprise ».
Contact : jean-francois.ballay@edf.fr
- Le champ de la formation professionnelle crée ainsi des dispositifs censés répondre à des cahiers des charges précis, et soumis, en aval, à des modalités d’évaluation. Ces modalités peuvent être parfois assez simples, par exemple quand les participants évaluent un séminaire ou un stage de management (un questionnaire rempli à l’issue du stage). Mais il existe aussi des cas plus complexes, par exemple les formations qualifiantes, où un jury de professeurs, de formateurs et de tuteurs est constitué pour juger des résultats d’un apprenti. Le cas des cursus d’apprentissage par alternance se réfère au modèle canonique de l’école, du point de vue de l’évaluation, puisque c’est la situation typique où l’on peut délibérer collégialement sur les critères d’appréciation des acquis. Les managers et les cadres des fonctions d’appui ont, eux aussi, besoin de se professionnaliser, mais c’est plus compliqué à évaluer. La modalité est alors en grande partie qualitative et subjective : il n’y a pas d’instance supérieure, comme dans le cas de l’école, pour juger des résultats. En outre, comment évaluer les acquis à l’issue d’un séminaire sur la santé et la sécurité au travail, ou sur le développement durable ? Dans ces cas, l’accent est mis de préférence sur des aspects comme l’auto-évaluation et sur l’appréciation de la démarche pédagogique mise en oeuvre par les intervenants. Avec les limites inhérentes à cet exercice...
Ce qu’un individu apprend reste en grande partie invisible
- Au-delà de cette large diversité des modalités d’évaluation des compétences, « attendues » ou « acquises », il faut retenir que ce qu’un individu apprend ne peut guère se réduire à une mesure quantitative : la connaissance, qu’elle soit acquise sur le terrain dans un projet, dans un réseau professionnel, ou dans des cursus de formation, génère d’une part des effets externes directement visibles et, d’autre part, des effets internes non mesurables qui peuvent s’échelonner dans le temps. Parfois, ce sont ces effets internes qui s’avèrent les plus importants (ce qui ne veut pas dire, d’ailleurs, qu’ils soient « efficaces » !). Par exemple, les « savoirs d’expérience » d’un expert ou d’un manager se voient en de nombreuses occasions – mais de l’extérieur : capacité à résoudre un problème complexe, à anticiper un signal faible dans l’environnement, ou à faire des liens entre des problèmes distincts. Il est indispensable de prendre conscience de cette complexité de la compétence « réelle » des hommes, qui peut être souvent en écart avec le modèle théorique issu de la GPEC. Si l’on veut atteindre la sacro-sainte « excellence » en matière de développement des compétences, cela suppose, au-delà des instruments de mesure quantitative et des dispositifs institutionnels, une culture et des modalités concrètes d’analyse qualitative sur le terrain, de délibération et d’évaluation des connaissances entre pairs, entre parties prenantes du métier. Et, plus encore peut-être, de porter une grande attention à toutes les conditions psychologiques et sociales dont l’entreprise a besoin pour exister durablement et pour être utile à la société – ce qui, rappelons-le, est tout de même une finalité de cette forme d’organisation productive que l’on nomme l’« entreprise ».
Contact : jean-francois.ballay@edf.fr
Jean-François Ballay est un spécialiste de la formation, de la gestion des connaissances et des compétences, avec 25 ans d’expérience en grande entreprise où il a des responsabilités dans le domaine de la formation. Il dirige un séminaire à Science Po depuis 12 ans. Il est intervenu dans de nombreuses conférences, a publié un grand nombre d’articles, et a écrit plusieurs ouvrages, dont « Tous managers du savoir » aux éditions d’Organisation, et « Capitaliser et transmettre les savoir-faire de l’entreprise », aux éditions Eyrolles. Il a participé à des groupes de travail sur l’économie de la connaissance, notamment pour le Commissariat du Plan, et est intervenu également au Québec. De formation initiale double, il est ingénieur et littéraire, et a une pratique dans les arts du spectacle. |
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