D’ores et déjà la porosité entre la sphère publique et privée n’est plus de mise en entreprise. Et pas forcément dans le sens où on le croit. Ainsi, par exemple, une enquête IPSOS au profit de Microsoft (avril 2011) estimait que 71 % des actifs avouent tester d'abord les technologies dans la sphère privée avant de les utiliser dans la sphère de l’entreprise. Comme quoi la sphère privée serait déjà le laboratoire de la sphère publique. Et en plus cela serait gage d’efficacité dans leur travail en entreprise, selon 49 % des personnes interrogées. Qu’est-ce que cela pourrait changer dans le domaine de la formation continue ?

Numérisation formative

Regardons les chiffres de plus près : près d'un actif sur deux a accès à un ordinateur sur son lieu de travail. Cela signifie que pour un actif sur deux la formation peut utiliser soit le eLearning soit le blended learning. Comme la France connaît approximativement 25 millions d'actifs, 12 millions seraient donc équipés d'ordinateurs sur leur lieu de travail, il reste alors 13 millions de personnes qui subiraient la fracture numérique et seraient ainsi privées des avantages de la numérisation formative. La sphère privée de l’IT peut-être un début de solution, en effet, sur les 13 millions de personnes non professionnellement connectées, 9 millions sont équipées d'un ordinateur personnel à la maison. Autrement dit, si la formation accepte une nouvelle donne privée, la couverture numérique de la formation serait de 85 %. Cela fait réfléchir…

Mobile learning

Deux autres points pourraient nourrir notre réflexion : pour la première fois, 2011 sera l'année où la vente de Smartphones sera supérieure à la vente de téléphones classiques, et 2011 sera aussi l’année où la connexion Internet passée sur le mobile sera supérieure à celle passée sur des fixes. Le mobile devient la norme. La formation a déjà pris en compte le phénomène en créant le M learning, aujourd’hui à la marge, mais qui devrait dans le temps s'imposer. Avec la mobilité, il devient de plus en plus difficile d’effectuer une distinction privée professionnelle. Déjà, on estime que 3 Français sur 10 sont connectés en permanence… et compte tenu de l’historique, le chiffre ne cesse de croître. Le potentiel est là pour faire du temps réel…

L’IT devient un droit

Après des années à avoir construit une protection privée voilà qu’elle semble céder sous la pression de l’entreprise. Mais les choses vont dans les deux sens. Cette même enquête Ipsos signalait qu'un salarié sur deux était prêt à quitter une entreprise si l'outil technique n'était pas satisfaisant. L’IT devient un droit ;  à tel point que plus de 45 % des professionnels sont prêts à utiliser une technologie validée dans le privé, même si l'entreprise la refuse. Les frontières bougent et l’avenir de la formation aussi.

L'enjeu n'est pas tant d'utiliser le privé comme un nouveau canal que d’organiser le privé au sein de l’entreprise, internaliser l’externalisation de la formation. Si chacun se forme en dehors de l'entreprise sans coordination, la formation en entreprise perdrait sa raison d'être. Il ne faut pas confondre la formation et le service formation, l’institution sociale versus la pratique individuelle. Cette porosité réinterroge la place stratégique de la formation en entreprise et crée plus d’opportunités que de problèmes.

A propos de l’auteur :

Stéphane Diébold a mis son expérience au service de l’innovation pédagogique et de la performance en entreprise, au sein de TEMNA (www.temna.fr) dont il est le fondateur depuis 2003. Associatif, il a assumé des responsabilités dans une dizaine d’association, essentiellement formatives, aujourd’hui Vice-président du GARF (Groupement des acteurs et responsables formation) et de l’ETDF (European traning and development federation – Fédération européenne pour la formation et le développement.

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