DIF : vers un clash financier et social majeur ?

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Alors qu'il vient de fêter son 5e anniversaire, le Droit Individuel à la Formation peine à s'imposer dans le paysage de la formation professionnelle. La faute à un manque d'appropriation de la part des salariés, et à des entreprises qui avancent à reculons sur ce dossier.


En 2007, le DIF n'a concerné que 4 % des 16 millions de salariés du privé. Quatre ans après l'ouverture de ce droit à la formation à tous les salariés, le constat est plus qu'alarmant. Avec une progression d'1% par an, il faudra à ce rythme plus de 70 ans pour que le DIF bénéficie à l'ensemble des salariés !
Pour comprendre les raisons de ce raté au démarrage, il faut remonter à la source selon Didier Cozin, directeur de l'Agence pour la Formation Tout au Long de la Vie (AFTLV). « La loi a retenu le principe du droit d'initiative. C'est donc le salarié qui doit formuler la demande de formation. Le problème, c'est que le mode de capitalisation progressif des 120 heures sur six ans n'a pas contribué à rendre le dispositif visible. Et lorsqu'il est connu, les salariés, surtout les moins qualifiés, ont peur de se lancer en craignant de passer pour des revendicateurs. S'ajoute à cela des freins secondaires. Le DIF s'effectue en effet en dehors du temps de travail et l'allocation de formation est imposable. Résultat : les salariés peu qualifiés préfèrent renoncer à se former pour ne pas sortir des minimas sociaux. » Une posture intenable... Côté entreprises, le paysage est tout aussi sombre. « Pour l'instant, beaucoup ne font presque rien prétextant qu'elles n'ont pas de demandes, regrette Didier Cozin. Il en existe même certaines qui s'appuient sur la loi prévoyant un désaccord possible dans le choix de la formation pour refuser toutes les demandes qui ne les intéressent pas ! Cette posture va vite devenir intenable, surtout pour les plus grandes. Imaginons qu'en 2010, tous leurs salariés fassent valoir leur droit avec le soutien des syndicats. Elles s'exposeront à un climat social détestable et à de grandes difficultés financières. Le DIF représente en effet potentiellement un coût de 3 600 € par salarié. Si vous employez 1 000 personnes, vous devrez couvrir un risque de 3,6 millions d'euros. » Le financement, nerf de la guerre Le financement du DIF, qui peut se faire sur le 0,9 % du plan de formation ou sur le 0,5 % de la professionnalisation obligatoirement versé aux OPCA, constituera le nerf de la guerre. « Pour repousser le problème, les entreprises ont opté pour le 0,5 %, observe Didier Cozin. Au début, les OPCA ont payé, mais aujourd'hui, ils ne peuvent plus suivre et seront de toutes façons réformés avant la fin de l'année. Il faudra donc se reporter sur le plan de formation avec à la clé beaucoup de remises en cause pour les grandes entreprises et les organismes de formation peu habitués à formuler des plans de formation aux salariés les moins qualifiés. » S'attaquer au problème maintenant Comment sortir de l'impasse ? « En incitant les salariés à s'approprier le dispositif en effectuant dès à présent leur demande de DIF avant que celui-ci ne se transforme en droit virtuel, conseille Didier Cozin. Il faut aussi faire comprendre aux entreprises qu'elles feraient mieux de s'attaquer maintenant au problème, car en 2010, elles n'auront plus le choix. La solution est toute simple puisqu'il suffit de mettre en place un catalogue de formation DIF. Les entreprises qui le font, en instituant des relais pour diffuser le message, affichent dès la 1ère année 30 à 40 % de demandes de DIF. Les salariés attendent simplement des entreprises qu'elles leur donnent le signal de départ », conclut Didier Cozin. Yves Rivoal

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