Faut-il érotiser la formation ? Par Stéphane Diebold

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Qu’est-ce qu’Eros, dieu de l’amour et du désir, peut bien faire en formation ? Certains parlaient déjà de séduction en formation, jeux de l’amour et du hasard, mais d’autres comme Bernard Steigler militent pour une érotisation de la formation… jusqu’où faut-il aller ? Et si l’érotisation est de mise, jusqu’où aller sans entrer dans la pornographie de la formation ? Qu’est-ce que cela recouvre ?

L’érotisation est un outil au service de la lutte contre la démotivation des apprenants. Il s’agit de faire circuler le désir de celui qui sait vers celui qui apprend. Le formateur montre sa jouissance symbolique dans la maîtrise du savoir. Et l’apprenant, face à une telle démonstration de plaisir, effectue un transfert. On a tous connu un professeur qui était tellement illuminé par sa matière qu’il donnait l’envie de rentrer dans son univers, d’apprendre comme lui, comme s’il avait découvert la fontaine de jouissance. Ce transfert est au cœur de la sublimation de la formation. Ce mécanisme bien souvent expliqué prend une proportion particulière en entreprise. Il est nécessaire de sélectionner les formateurs occasionnels ou professionnels en fonction de leur capacité à sublimer leur savoir. Il ne s’agit pas tant, ou pas seulement, de savoir mais de savoir faire rêver. Dure responsabilité pour les formateurs…

Animation et pédagogie

Comment peut-on sublimer une formation ? Il s’agit tout à la fois d’un problème d’animation et de pédagogie. En matière d’animation, la dotation est fortement inégalitaire, certains formateurs sont des séducteurs nés, là ou d’autres en sont dépourvus. La séduction vient d’un équilibre précaire entre l’accessibilité et l’inaccessibilité. Un animateur qui se donnerait trop vite perdrait toute sa capacité à l’érotisation, il y a un jeu subtil qui s’inscrit dans le temps. Et comme il existe des écoles de la séduction, il doit exister aussi des écoles d’animation où chacun doit trouver son style et sa capacité à impacter. Outre l’animation, il existe aussi la pédagogie qui écrit une romance et le savoir reprend tout son sens et toute sa saveur. Il s’agit de lutter contre le morcellement du savoir pour remettre en ordre les choses. Apprendre à lire pour le seul plaisir de lire ne présente que peu d’intérêt, la lecture ouvre la porte à autre chose, c’est un moyen. L’érotisation devient une ingénierie, pour non seulement capter l’attention, mais aussi assurer la motivation des apprenants. Il est étrange d’entendre les formateurs se plaindre d’avoir des apprenants démotivés, là, où leur travail est de les motiver. 

Motiver le motivateur

Ce qui est intéressant c’est que cette sublimation, motivation, tant appelée par tous est le travail de formation. Reste bien évidement à motiver le motivateur. Si l’animateur n’a plus goût, ou n’a pas goût, à la transmission, son travail devient un spectacle sans saveur et au mieux, l’apprenant aura une formation pornographique, une formation sans saveur, comme un amour sans éros, une machine à faire, mais sans aucune gourmandise. La performance demandée par l’entreprise nécessite au moins que cette dernière fasse l’effort d’y croire et d’industrialiser cette motivation. Jamais les entreprises n’on eut autant besoin de formation, à condition qu’elle soit érotisée… voilà de quoi s’exciter.

A propos de l’auteur :

Stéphane Diébold a mis son expérience au service de l’innovation pédagogique et de la performance en entreprise, au sein de TEMNA (www.temna.fr) dont il est le fondateur depuis 2003. Associatif, il a assumé des responsabilités dans une dizaine d’association, essentiellement formatives, aujourd’hui Vice-président du GARF (Groupement des acteurs et responsables formation) et de l’ETDF (European traning and development federation – Fédération européenne pour la formation et le développement).

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